Informatique-Industrielle

GDF SUEZ garde un œil constant sur ses éoliennes

Le premier producteur éolien d’électricité
en France connecte peu à peu l’ensemble de ses équipements à un centre de
contrôle unique, dans la Marne.  Un outil
inédit qui lui offre des fonctions de suivi et, bientôt, d’analyse des
équipements.

 

Le vent et
le soleil. Voilà les deux matières premières essentielles à GDF SUEZ EnR
Opérations, filiale en charge de l’exploitation des énergies renouvelables au
sein du Groupe. Et dans ce domaine, GDF SUEZ est désormais un acteur
d’envergure, premier producteur éolien en France, avec 101 parcs éoliens
installés, pour une capacité totale de 1020 mégawatts et 33 mégawatts en
solaire. Cela représente un patrimoine industriel proche d’un milliard d’euros.
Afin de gérer au plus près cette activité, le groupe remonte progressivement
l’ensemble des informations relatives à ses éoliennes et à ses fermes solaires
vers un site unique à Châlons-en-Champagne (Marne) : le ”Centre de conduite des
énergies renouvelables”, opérationnel depuis fin 2010. Sa mission ? « Ce centre
assure la supervision des parcs EnR sous exploitation de GDF SUEZ EnR
Opérations. Il doit être en permanence au courant de ce qui se passe sur les
parcs connectés, alerter les exploitants quand un événement important survient,
mais aussi assurer l’agrégation des données et leur analyse, afin de suivre les
performances techniques et financières des parcs », répond Olivier Renvoisé,
Responsable des Systèmes d’Information de l’entité Production Electricité. ”Le
système d’information du Centre de conduite”, baptisé EnR Prod (Energies
Renouvelables Production), sert également d’œil et de main à distance à
l’exploitant, notamment lors de l’exécution d’opérations sur les équipements.

La tâche du
centre est essentielle, car au-delà de l’exploitation des parcs, quels que
soient les caprices de la météo, GDF SUEZ doit passer sous les fourches
caudines de RTE et ERDF, chargés du transport et de la distribution de
l’énergie électrique en France. Ces deux sociétés fixent le niveau de
production et peuvent à tout moment exiger la coupure d’un parc. Sur le réseau
de distribution en moyenne tension (HTA), ERDF se charge lui-même des
éventuelles coupures. Sur les parcs connectés au réseau de transport
(haute-tension HTB, au-delà de 50000 V), en revanche, l’exploitant n’a que
quelques minutes pour déconnecter ses machines sur ordre de RTE.

 

Centraliser les informations

Le système
d’information EnR Prod tire son origine du projet EGENOSS, lancé en 2009 et
destiné à mutualiser les outils de contrôle du Groupe. « Il s’agissait de
relier les centrales thermiques avec un serveur commun, puis de faire la même
chose pour chaque type d’énergie », se souvient Olivier Renvoisé. Pourtant, la
solution envisagée à l’époque se prêtait mal aux spécificités des énergies
renouvelables.

En outre, «
chaque entité de GDF SUEZ EnR assurait l’exploitation avec des outils proposés
par ses fournisseurs. Il y avait une forte hétérogénéité entre les solutions,
mais aussi au sein même des entités », explique-t-il. Afin d’être en mesure de
connecter d’abord le parc des Hauts Pays d’Erelia (le plus important parc
français, constitué de 39 éoliennes de 2 MW) en moins d’un an, le projet EnR
Prod est sorti d’EGENOSS et le Responsable des systèmes d’information a lancé
début 2010 un benchmark des solutions de SCADA du marché. L’équipe dédiée au
développement de l’outil EnR Prod, basée à Lyon, a été constituée au printemps
2010. Elle a mis les bouchées doubles pour livrer son SCADA à la fin de la même
année. Pari tenu !

 

Une salle de contrôle unique

Avec le
système d’information EnR Prod, le centre de conduite de Châlons-en-Champagne
garde un œil sur les installations 24h/24. L’interface homme-machine s’appuie
sur quatre écrans ArchestrA : un premier localise sur une carte de l’Europe les
parcs raccordés ; le deuxième et le troisième permettent de visualiser l’état
d’un parc et d’un équipement en particulier ; le quatrième est dédié aux
alarmes. Au centre de la salle, un grand écran peut reprendre ces informations
ou en afficher d’autres, comme les courbes de production en temps réel.

L’application
de Wonderware est hébergée sur des serveurs distants et la salle de contrôle
n’a besoin que de deux PC. Cette approche choisie par le Responsable Systèmes
Information permet de garantir des évolutions sans équivalent. La communication
avec les équipements passe par un réseau dédié et un tunnel VPN. En cas de
problème, l’application peut donc être basculée sur un poste de secours : un
simple PC portable. Elle pourrait aussi être gérée depuis Lyon, où l’équipe de
développement dispose d’un clone.

Une seule
application distribuée est mise en œuvre. La communication avec les éoliennes
ainsi que le traitement applicatif d’un parc est déporté au plus près des
équipements. Cela garantit une meilleure disponibilité du système et une
meilleure répartition de la charge. En cas de coupure réseau entre le site
distant et le serveur central, les données sont stockées en local. « Environ
plusieurs centaines de milliers d’informations remontent chaque jour »,
commente Raphael Genin, Responsable du centre de conduite. Ces données
remontent toutes les 1 à 10 secondes depuis chaque éolienne et chaque poste
électrique. Sur ce point, GDF SUEZ a fait un choix précis : uniformiser
l’acquisition des données. Et l’équipe lyonnaise s’est montrée très efficace
sur ce point « auparavant, il fallait jusqu’à 20 minutes pour se connecter à un
parc. Aujourd’hui, il suffit d’un clic pour passer de l’un à l’autre », déclare
Raphaël Genin. Une fonctionnalité capitale lorsque l’on doit pouvoir couper un
parc en 5 minutes…

Les
informations recueillies sont utilisées à différentes fins : suivi de la
production, surveillance dans le cadre d’opération de maintenance, mais aussi
de créations automatiques de rapports. « Dans ce domaine encore, nous obtenons
en quelques clics ce qui demandait plusieurs heures, voire plusieurs jours
auparavant », note le responsable du centre. L’ensemble des données brutes
ainsi que les 80 000 alarmes qui remontent par an sont sauvegardées ad vitam
aeternam.

Grâce à la
technologie de modélisation orientée objet, l’équipe de développement peut
réutiliser à chaque nouveau raccordement des objets complets construits et
validés pour un précédent parc. Ainsi, si le premier parc a été raccordé en 9
mois, le deuxième (30 éoliennes) a nécessité 2 fois moins de temps. Désormais,
l’équipe de GDF SUEZ EnR Opérations est même en mesure de connecter un nouveau
parc en quelques semaines seulement.

 

Aller plus loin

Actuellement,
11 parcs éoliens et un parc solaire, soit 171 machines totalisant une capacité
de 381 MW, sont raccordés au centre de Châlons-en-Champagne. « Fin 2012, 18
parcs et 237 machines seront raccordés, pour une puissance totale de 491 MW.
Cela représentera près de la moitié du parc éolien de GDF SUEZ en France »,
annonce Raphael Genin. Pour suivre cette cadence, les équipes de Lyon et de
Châlons-en-Champagne s’appuient sur une organisation bien réglée et une base
documentaire commune, pivot de tout échange. Tout changement souhaité par les
exploitants, par exemple, fait l’objet d’une demande écrite dont on peut suivre
l’évolution, jusqu’à sa validation. « Ce formalisme était lourd au début, mais
cela nous permet d’aller plus vite aujourd’hui » commente Raphaël Genin.

La montée en
puissance est réussie. « En un an et demi, la solution a atteint la maturité.
Nous n’en sommes plus à l’expérimentation, mais à un niveau industriel. Il faut
désormais quelques semaines seulement pour raccorder un parc et nos équipes
sont prêtes pour aller plus loin », déclare Olivier Renvoisé. Aller plus loin,
cela signifie notamment acquérir encore davantage de données et les trier plus
finement pour améliorer la maintenance des équipements, affiner les
prévisionnels de production et mettre à disposition du management des
informations encore plus pertinentes. Cela passera aussi par l’analyse des
performances des équipements pour détecter des dysfonctionnements ou, au
contraire, des surperformances inattendues, voire « comparer les machines entre
elles, afin de favoriser tel ou tel type d’achat auprès de nos fournisseurs »,
explique le responsable de services informatiques.

La suite,
elle se dessinera peut-être aussi hors de l’hexagone. Rien ne s’y oppose car la
solution mise en place par GDF SUEZ EnR opérations pourrait gérer des
équipements partout en Europe, sans limite de taille. Une première
expérimentation est d’ailleurs en cours avec l’Italie.

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