AutomatismeInformatique-Industrielle

B&R passe la vitesse supérieure

On connaissait l’Autrichien pour
son offre matérielle et logicielle
destinée à l’automatisation des
machines. Désormais, il s’attaque
au niveau supérieur avec des
solutions « Industrie 4.0 » déjà
mises en œuvre dans sa propre
organisation.

E lle est loin, la petite entre prise installée dans un petit atelier d’Eggelsberg, –
bourgade autrichienne plantée à
quelques dizaines de kilomètres
de Salzbourg. Depuis sa création
en 1979 par Erwin Bernecker et
Josef Rainer, B&R Automation
a bien grandi ! Aujourd’hui,
l’entreprise toujours familiale
spécialisée dans les solutions d’automatismes industriels emploie
2 650 personnes, dont 1 710
à Eggelsberg, et a embauché
700 nouveaux ingénieurs ces
cinq dernières années. Quant à son chiffre d’affaires, il progresse
en moyenne de 15 % tous les ans
et devrait dépasser 600 millions
d’euros en 2015. Que demander
de plus ? Atteindre le milliard
d’euros à l’horizon 2020 !

Une gamme élargie

Pour atteindre son objectif, B&R
ne néglige aucune piste. D’abord,
celui qui proposait jusque-là une
gamme d’automates, d’entrées
sorties classiques et de sécurité,
de variateurs et moto-variateurs,
de PC industriels et d’IHM – sans
compter ses solutions pour les
engins mobiles -, s’attaque à
l’étage supérieur de la pyramide
du CIM avec Aprol, solution
globale de contrôle de process.
Une offre complète, couvrant le
Plant Automation, l’automatisation des centres de production,
le contrôle de process et d’infrastructures, la gestion de l’énergie,
la maintenance conditionnelle,
le contrôle de process avancé
et l’acquisition centralisée des données de production. « Nous
proposons ces solutions depuis
15 ans en Autriche et en Allemagne.
Aujourd’hui, nous les lançons dans
huit autres pays d’Europe, dont la
France, annonce Peter Gucher,
directeur général en charge des
ventes internationales. Pour chaque
pays, nous adopterons une approche
adaptée et ciblée sur des secteurs
clés. En France, nous visons notamment l’agroalimentaire, l’industrie
pharmaceutique et chimique, les
infrastructures, l’énergie, la sidérurgie,
l’automobile… »

Cet élargissement de gamme
implique une évolution importante
de la structure de vente car, si
elles possèdent un lien évident
et que B&R se targue de disposer d’une offre technologique
« harmonisée », l’automatisation des machines et la gestion
d’usines entières constituent
deux domaines presque opposés.
« Ce sont des marchés différents
et des clients différents. Le travail
que nous faisons avec les OEM est
davantage associé à une notion de
série. Avec Aprol, on parle plutôt de
projets uniques en relation avec les
clients finaux et des intégrateurs »,
note Walter Burgstaller, directeur des ventes Europe de B&R.
« Pour accompagner nos équipes
locales, nous disposons déjà de deux
centres de compétences internationaux spécialisés sur ces solutions
en Allemagne et en Autriche. Pour
la commercialisation, nous allons
conserver les équipes focalisées sur
l’automatisation des machines et
créer une seconde structure dédiée à
Aprol, en s’adaptant aux spécificités
de chaque pays. » Pour autant, pas question de tourner le dos à
son cœur de métier. « Avec notre
équipe actuelle, nous allons continuer
d’innover pour nos clients constructeurs de machines ; en complé-
ment, nous établirons une nouvelle
équipe forte et expérimentée pour
le développement de nos solutions
de contrôle de process et d’usines
dans le monde entier », assure le
directeur des ventes Europe.

Une usine « 4.0 »

La progression de B&R passe
également par un outil de production qui applique à la lettre les
recettes de l’usine connectée et
de l’Industrie 4.0, avec une particularité : tous les processus de
l’usine sont pilotés directement
depuis SAP. « Nous avons plus de
3 000 produits au catalogue que
nous produisons à la commande.
Parmi eux, certains sont standards,
d’autres présentent des possibilités
de configuration très importantes.
Pour nos PC industriels, il existe près
de 250 milliards de possibilités !
Certains sont produits à l’unité,
d’autres par lots pouvant atteindre
15 000 unités », annonce Gerald
Haas, Responsable de l’industrialisation globale chez B&R. La
gestion de cette variété passe
par des options différentes. Pour
les produits réalisés en grande
série, l’Autrichien fait appel à une
automatisation poussée. Pour la
production de ses cartes électroniques – qui sont toutes conçues, fabriquées et testées sur place -,
par exemple, les 80 millions de
composants consommés par mois
sont identifiés, stockés dans des
armoires rotatives puis installés,
en fonction des séries à lancer, sur
des trolleys qui viennent se brancher directement sur les machines
de placement automatisé. « On
assure ainsi un changement de
production en 10 minutes contre
plusieurs heures avec des systèmes
classiques », note Gerald Haas,
Responsable des systèmes sur
le site. L’impression des cartes,
le placement des composants,
la soudure et le test (In Circuit
Test) des produits sont réalisés automatiquement, toujours
en allant piocher les informations nécessaires (références
à produire, profil optimal de la
vague de soudure, programmes de
tests…) directement dans SAP. La
fabrication des cartes abritant des
composants de puissance met en
œuvre un placement manuel et un
procédé de soudure sélective, lui
aussi piloté par SAP.

Produits standard par excellence,
les modules d’entrée/sortie X20 font eux aussi appel à un haut
degré d’automatisation. Leur
assemblage est réalisé sur trois
lignes, trois machines spéciales qui
soudent les boîtiers, les gravent, et
lancent les campagnes de test en
fin de ligne. Des machines connectées à SAP, mais aussi à Aprol
PDA, qui récupère les données
de production pour générer en
direct les indicateurs de suivi de
production et mettre en œuvre
une maintenance préventive des
installations. Autre particularité
de ces machines, elles sont entiè-
rement équipées de matériel B&R.
Une démarche que l’Autrichien
a également imposé pour son
stockage automatisé. Il s’agit d’un
dispositif de 22 000 emplacements
dont les transstockeurs sont mus
par des Acopos et des automates
du constructeur. Ici les ordres de
déplacement ne sont pas envoyés
par un WMS propriétaire mais
directement par SAP.

Du manuel quand il faut

Dans cette usine connectée,
un système central gère toutes
les données. La disponibilité est
assurée par des systèmes redondants et une maintenance préventive des installations, partout où
cela est possible. « Les machines
communiquent entre elles et avec
le niveau supérieur via Powerlink
et OPC-UA. Les échanges avec SAP
sont assurés au travers de requêtes
en XML », détaille Gerald Haas.
Mais quand il s’agit de fabrique
des produits à la commande,
B&R Automation n’hésite pas à
s’appuyer sur du travail manuel.
Le montage de ses PC industriels
est ainsi assuré par des opérateurs qui, dans une ambiance
feutrée, suivent sur un écran les
instructions de montage envoyées
depuis… SAP et se laissent guider
par un dispositif de « pick to light »
qui leur indique quelles pièces
utiliser. Une deuxième zone
de l’atelier est consacrée à la
« personnalisation finale » des
machines, qui s’achève sur un
test « live » de cinq heures de la
machine selon un programme de
test aussi personnalisé et l’installation des applications et logiciels
commandés par le client. Et cela
fonctionne plutôt bien puisque cet
atelier monte près de 40 000 PC
par an !

Le nouvel atelier chargé du
montage des variateurs Acopos,
mais également des tout nouveaux
Acopos P3 bientôt commercialisés et caractérisés par leur plus
grande modularité, suit le même
principe, en y ajoutant l’emploi
de chariots portant le produit
et déplacé de poste en poste,
jusqu’au banc de test final. Encore
en phase de lancement, « la fabrication des Acopos P3 atteindra
sa vitesse de croisière en 2016 »,
assure Gerald Haas.

Prêt pour le milliard !

Depuis sa création, l’entreprise a
équipé 2,2 millions de machines,
dont 270 000 en 2014. Et l’évolution de ses besoins en termes
de production a suivi celle de
ses ventes, qui doublent tous les
cinq ans. Après le déménagement
sur le site actuel en 1987, l’usine
a subi une première extension
de 10 000 m² en 2000, puis une
seconde, en 2009, portant la
surface totale à 65 000 m². Ce
site désormais ultramoderne (une
autre usine, à quelques kilomètres
d’Eggelsberg produit la gamme
Mobile Automation) qui tourne
en 3×8 sera-t-il suffisant encore
longtemps ? « Il est suffisant pour
assurer la production correspondant
à un chiffre d’affaires d’un milliard
d’euros », assure Peter Gucher.
D’ici là, les équipes de R&D
installées dans l’un des bâtiments
devront laisser leur place à des
ateliers de fabrication. Ensuite, « il
nous reste de la place libre autour de
l’usine », conclut-il.

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