Recherche-innovationVision-Identification

Vision 2016, des technologies qui en mettent plein les yeux

Tous les deux ans, Stuttgart
redevient pour quelques jours,
la capitale mondiale de la vision
industrielle et des applications
permettant de piloter les
processus et les machines au
moyen de la lumière dans un
spectre qui s’étend du domaine
visible à l’infrarouge. La cuvée
2016 a été une nouvelle fois à la
hauteur des attentes.

Quiconque veut produire de manière
connectée et entièrement
automatisée ne peut s’affranchir de
suivre le développement des technologies
liées à la vision industrielle et au traitement
de l’image. C’est à l’évidence ce qui explique
la santé remarquable de ce marché qui a
plus que doublé en dix ans. Dans toute
l’Europe, il connaît cette année, une
croissance située au alentour de 8 % selon
l’étude réalisée par l’association allemande
des industries de l’ingénierie mécanique,
VDMA.

Dans le classement du marché mondial
de la vision industrielle, la France arrive en
sixième position loin derrière l’Allemagne,
les Etats-Unis ou encore, la Chine et, faisant
jeu égal avec l’Italie et le Royaume Unis.
Les secteurs les plus largement engagés
dans la vision industrielle en Europe sont
la construction automobile, l’assemblage
électronique et électrotechnique et la
métallurgie, tandis que l’agro-alimentaire
amorce une remontée.

Des applications
extrêmement
diversifiées

Parmi les technologies exposées, ce
sont les caméras embarquées, l’imagerie
hyperspectrale et la vision 3D qui ont tout
spécialement attiré les 10 000 visiteurs
ayant fait le déplacement à Stuttgart début
novembre.

Certaines applications de la vision
numérique atteignent aujourd’hui
une forme de maturité puisque leurs
applications sont parfaitement maîtrisées.
C’est principalement le cas de l’imagerie
exploitant la lumière infrarouge qui connaît
de nombreux débouchés dans le domaine
de la sécurité pour alerter de la présence de
flammes bien sûr, mais aussi pour prévoir
qu’un dispositif électrique comme un
coupleur ou un disjoncteur va tomber en
panne.

L’industrie automobile a aussi recours à
des caméras fonctionnant dans l’infrarouge
pour vérifier le fonctionnement effectif des
équipements de dégivrage ou encore des
sièges chauffants. Dans les industries de
process (chimie, pharmaceutique, raffinage,
etc.), les caméras infrarouges apportent
une précision dans la surveillance des
cuves et des réacteurs biologiques qui
est inaccessible aux simples capteurs de
températures.

Mais c’est aujourd’hui la convergence de
technologies comme les caméras à haute
définition, les systèmes de transmission
de données à haut débit et les nouvelles approches algorithmiques mises en oeuvre
dans les logiciels qui donnent naissance aux
applications les plus spectaculaires.

Par exemple, si la persistance rétinienne
limite l’oeil humain à une perception
comprise entre 20 et 30 images par
seconde selon les individus, une caméra
numérique et un ordinateur peuvent
aisément s’affranchir d’une telle barrière.
Ainsi une caméra HD pourra délivrer jusqu’à
300 images/s pour peu qu’elle dispose
d’un support de communication adapté au
volume de données – immanquablement
important – qu’elle génère.

Si différents systèmes de transmission se
sont longtemps partagé le marché de la
vision industrielle à haute performance
(FireWire, CameraLink, etc.), deux
technologies se démarquent aujourd’hui
réellement : les interfaces USB 3.0 et GigE
Vision.

On trouve ainsi que plus en plus
communément, des caméras équipées
d’un port USB 3.0 capable de supporter
une bande passante théorique allant
jusqu’à 5 Gbits/s. De tels équipements sont aujourd’hui proposés à des coûts qui les
rendent largement accessibles à la fois à
l’achat mais aussi, au niveau des systèmes
auxquels ils sont raccordés puisque les ports
USB 3.0 sont aujourd’hui largement présents
jusque sur les PC industriels. Mais cette
interface universelle souffre d’un défaut
dans la cuirasse. Les liaisons USB 3.0 sont
en effet, sensibles aux interférences dans
la bande de 2,4 GHz utilisées notamment
pour les liaisons sans-fil Wi-Fi et Bluetooth.
De telles caméras trouvent leur place dans
des applications où le système recevant les
données est placé à leur proximité (moins
de 5 m). Au-delà, il est prudent d’installer
un convertisseur qui acheminera les images
dans un signal d’une tout autre nature
comme un flux optique.

L’autre standard de transmission de données
adapté à la vision industrielle qui s’impose
en force est le GigE Vision. Dérivé de Gigabit
Ethernet, il voit sa bande passante – 1 Gbit/s
– calée sur celle du standard qui lui a donné
son nom. La liaison GigE Vision est très
populaire auprès des intégrateurs car elle
concentre des fonctionnalités indispensables
dans les applications où la vidéo et les
images sont transmises sans compression
préalable : débit de données élevé
compatible, le câblage standardisé donc
à faible coût, support du plug-and-play et
compatibilité avec le matériel informatique
avec ou sans carte servant d’interface.

Du plan euclidien à
l’espace orthonormé

De nombreuses applications de la vision
industrielle occupent le créneau du contrôle
de la qualité en fin de chaîne de fabrication
ou d’assemblage. Une caméra permet
d’automatiser tout ou partie des tests, sans
connaître la lassitude qui au fil des heures
affecte les opérateurs.

Partant, il est possible de systématiser les
contrôles plutôt que de les réaliser sur
un échantillon périodique, ce qui permet
de garantir la qualité de tous produits.
L’automatisation permet aussi de multiplier
les points de contrôle en installant des
dispositifs de vision industrielle à toutes les
étapes critiques de la fabrication.

Pour tirer le maximum de cet apport, il
est indispensable que les dispositifs de
vision industrielle déployés, remplissent
leur mission sans ralentir le cycle de
fabrication. A cette fin, il est primordial
que la vérification effectuée soit réalisée
à la volée. Le traitement des images
aboutit systématiquement au traitement
d’importants volumes de données. On assiste
à la naissance d’une nouvelle génération
de caméra et de détecteurs optiques,
embarquant dans leur électronique, des
circuits programmables. Le traitement
logiciel attendu peut être téléchargé dans le
dispositif de vision industrielle, ce qui accroît
généralement la vitesse de traitement. De
telles caméras intéressent par exemple,
les usines produisant au métrage, des
tissus et des revêtements au rouleau. Une
caméra va détecter à la volée, les défauts
d’aspect (accrocs, rayures, tâches, etc.)
ou de structure (noeuds, filés, etc.). Dans
l’industrie agro-alimentaire, des systèmes
de vision sont en mesure de reconnaître les
plats préparés en fonction de leur forme
ou de leur contenu sur les chaînes de
conditionnement, permettant un traitement
des batchs sans reprogrammation des
équipements.

Les traitements d’images automatisés
connaissent aussi un fort développement
dans la reconnaissance de formes diverses
par auto-apprentissage. Plusieurs pistes sont
actuellement explorées avec l’objectif de
créer des systèmes de guidage intelligents,
capables de piloter tout type d’engins
mobiles, le but ultime étant évidemment
d’arriver à la voiture entièrement autonome.

Les caméras 3D intéressent plus
spécialement les développeurs de systèmes
de pilotage par des humains à distance.
Il s’agit dans ce cas de fournir une image
précise, chargée en détails de toutes sortes
et sur laquelle peuvent être incrustées
des données relatives au déplacement
(vitesse, position, direction suivie, dérives,
trajectoires attendues, etc.).

D’autres approches s’appuient sur la vision
stéréoscopique ou multiscopique en
installant deux ou plusieurs caméras à une
distance significative les unes des autres. La
vision stéréoscopique humaine par exemple, s’appuie sur deux images captées à une distance de 6 à 8
centimètres seulement. Il en résulte une parallaxe tendue
qui rend la stéréoscopie anecdotique à seulement quelques
mètres de l’observateur. Embarquées à bord d’un véhicule,
les caméras peuvent aisément être éloignées d’une distance
de 100 à 300 centimètres et délivrer une centaine d’images
par seconde, voire plus. Traitées par des logiciels adaptés,
les images stéréoscopiques ou multiscopiques apportent
une batterie d’informations qui peuvent être corrélées ou
non, avec les données issues d’autres types de capteurs.
Un système de guidage ainsi équipé peut par exemple,
déterminer si la trajectoire d’un objet en déplacement autour
de sa position suit une trajectoire rectiligne, circulaire ou
hyperbolique en deux ou trois dimensions significatives.
Corrélées à des capteurs de proximité, ces informations
délivrent des indications sur les risques de collision, de
croisement de trajectoire, etc.

De nouvelles approches
logicielles

Moins centrée sur l’industrie, l’autre direction dans
laquelle se développe la vision numérique, est celle de la
reconnaissance des individus avec des applications dans le
domaine du contrôle d’accès automatisé et de la surveillance
des lieux accueillant du public.

L’un des développements les plus intéressants qui était
exposé à Stuttgart cette année, se trouvait sur le stand mis
en place par le Laboratoire d’électronique et de technologie
de l’information du CEA (CEA-Leti). Le Laboratoire
d’Intégration des systèmes et des technologies (CEA List)
a mis au point un logiciel capable de traiter des images
à la volée et de déterminer en un temps record, si elles
appartiennent à un échantillon donné par exemple, des
visages.

Le logiciel a besoin au préalable d’être en quelque sorte
éduqué, en lui fournissant une banque d’images au sein de
laquelle il réalisera des identifications qui seront validées
par un opérateur. A l’issue de cette étape, le programme
est capable de filtrer un grand nombre d’échantillons par
seconde. Selon les tests réalisés par le CEA List, un simple
nano-ordinateur tel que le Raspberry Pi 2B peut filtrer plus
de 300 échantillons/s alors qu’une carte Matrix équipée
d’un GPU à haute performance peut en revanche exploiter
des milliers d’échantillons. La technologie exploitée pour
arriver à un tel niveau de performance, repose sur le principe
des réseaux de neurones ; des choix élémentaires qui
ne requièrent que quelques instructions, sont opérés en
cascade pour arriver à une matrice de données complexes
en un temps extrêmement réduit avec un risque d’erreur
minime.

Sur ce même stand, le CEA Leti avait installé une caméra
connectée à une application capable de déterminer le sexe
des personnes situées dans son champ de vision et même….
leur humeur.

N’en doutons pas, la vision numérique et ses applications
dans la vision industrielle n’ont pas fini de nous étonner !

j109_32-35

Ces articles peuvent vous intéresser :